Aumoins j'aurai laissĂ© un beau cadavre est un appel Ă  la rĂ©volte. Vincent Macaigne propose un théùtre du dĂ©bordement et de l’excĂšs, drĂŽle et tragique, inventif, parfois outrancier, mais dont les images fulgurantes sidĂšrent par leur justesse. Le CDN accompagne le travail de Vincent Macaigne depuis la coproduction de Idiot! en 2009. Le metteur en scĂšne et son Ă©quipe ont Il est des spectacles qui, pour interpeller directement » le public, croient devoir organiser sa prise d’otage physique. Le prendre Ă  partie serait trop sobre il faut l’enjoindre d’applaudir, de se lever, de venir sur scĂšne, de pousser des cris. J’ai assistĂ© l’autre jour Ă  une manifestation » de ce genre, au Théùtre National de Chaillot Paris 16Ăšme, pour la reprise d’Au moins j’aurai laissĂ© un beau cadavre, ce spectacle créé par Vincent Macaigne au Festival d’Avignon d’aprĂšs Hamlet de Shakespeare. ComĂ©diens hurlant tous sur le mĂȘme ton, musique entraĂźnante mais qui vous casse les oreilles le théùtre offre heureusement des boules Quies aux spectateurs avant leur entrĂ©e dans la salle, nouveau roi dĂ©guisĂ© en banane gĂ©ante, qui ordonne au public de se lever et d’applaudir la moindre de ses dĂ©clarations insignifiantes
 Certains ont vu dans ce spectacle la preuve d’une belle Ă©nergie ». Je n’y ai vu qu’un fantasme de toute-puissance assez mĂ©prisant pour le public Macaigne peut se targuer de faire lever les foules pour applaudir une banane ; et surtout, un acharnement morbide Ă  vouloir Ă©craser le monde et le sens dans un mĂȘme magma informe Ă  base de hurlements, de sang qui coule Ă  flot, et de boue dĂ©goulinante. Pour captiver le public, est-il bien nĂ©cessaire de l’incarcĂ©rer de la sorte ? Certes non, et c’est mĂȘme tout le contraire, comme le prouve une fois de plus le nouveau spectacle de JoĂ«l Pommerat Cendrillon. Loin du bruit et des images prĂ©mĂąchĂ©es, c’est tout en poĂ©sie, en humour et en nuance que cet auteur secoue, toujours trĂšs fort, le regard du spectateur. Cendrillon est un conte pour enfants, mais le spectacle de Pommerat, aux Ateliers Berthier Paris 17Ăšme, est l’un des plus beaux moments de théùtre Ă  vivre en ce moment, pour les adultes aussi. L’hĂ©roĂŻne de ce conte dĂ»ment revisitĂ© est une petite fille en deuil, plutĂŽt peu gracieuse, mais pourvue d’un Ă©poustouflant sens de la rĂ©partie, et d’une imagination redoutable. Sandra tel est le vrai » prĂ©nom du personnage, vient de perdre sa mĂšre, et n’ayant pas pu saisir les derniers mots que lui murmurait la mourante, elle s’est persuadĂ©e que sa maman lui demandait de penser Ă  elle en permanence, pour lui prĂ©server une place chez les vivants. C’est ainsi qu’en toute simplicitĂ©, sous couvert de malentendu », Pommerat dĂ©compose avec une luciditĂ© stimulante, les liens irrĂ©ductibles entre le chagrin et la culpabilitĂ©. S’imposent alors des scĂšnes de panique terrible la fillette s’est fait offrir une montre Ă©norme qu’elle a programmĂ©e pour sonner toute les cinq minutes. Sur l’air de Ah vous dirais-je maman », l’alarme est lĂ  pour lui rappeler sans cesse sa mission, et combien elle est impossible. C’est une sorte de gag acide, cette montre qui intervient toujours de façon intempestive. Mais en mĂȘme temps, c’est une horloge tragique qui rappelle Baudelaire. Trois mille six cents fois par heure, la Seconde chuchote Souviens-toi ! », Ă©crivait le poĂšte. Et c’est ce mĂ©lange qui est fĂ©cond chez Pommerat, l’accessoire fait rire les uns et frissonner les autres, bref, loin d’enfermer les choses dans un sens unique, il met le rĂ©el en relief. Il en est ainsi de chaque dĂ©tail. Comme de celui-ci les filles de la future belle-mĂšre rebaptisent Sandra cendrier », parce que son pĂšre lui confie toujours, pour qu’elle les Ă©teigne en vitesse, les cigarettes qu’il fume en cachette. DĂ©positaire bien rĂ©elle des symptĂŽmes de son pĂšre angoissĂ©, et esclave imaginaire d’une mĂšre qui n’en demandait pas tant, le personnage de Sandra pose ainsi toutes les questions les plus essentielles de l’enfance, entre les transmissions accablantes et les culpabilitĂ©s qu’on s’invente. La distribution des rĂŽles participe aussi de cette ouverture du sens et de l’imaginaire. Cinq acteurs aussi Ă©tonnants que convaincants font vivre sur scĂšne neuf personnages. NoĂ©mie Carcaud incarne Ă  la fois une sƓur narquoise de Cendrillon, et la bonne fĂ©e de la fillette. Caroline Donnelly joue l’autre sƓur
 et le jeune prince. Alfredo Canavate interprĂšte Ă  la fois le pĂšre de Cendrillon et le roi. Il est le seul homme, dans ce spectacle qui pose surtout la question de la fĂ©minitĂ© et les rivalitĂ©s qu’elle engage. Car Cendrillon, c’est aussi l’histoire d’un duel symbolique entre les gĂ©nĂ©rations celle de la belle-mĂšre Catherine Mestoussis, grosse dame convaincue de faire » plus jeune que ses filles, et Cendrillon, frĂȘle fillette qui a dĂ©jĂ  plus de souvenirs que si elle avait mille ans. DĂ©borah Rouach Ă©tait d’ailleurs faite pour jouer ce rĂŽle petite silhouette brune et comĂ©dienne troublante, la moindre de ses paroles vous donne des frissons, tant elle sait faire parler l’enfance, dans sa fragilitĂ© et sa maturitĂ© paradoxale. Ainsi Pommerat montre-t-il le monde comme il est dans l’inconscient immense et compliquĂ©. Son spectacle, on le vit au moins autant qu’on le regarde, comme une expĂ©rience intense et troublante. Pour produire un tel effet, nul besoin de crier fort, ni de jouer les animations participatives ». Surtout pas. Aux Ateliers Berthier OdĂ©on Théùtre National de l’Europe, Paris 17Ăšme, jusqu’au 25 dĂ©cembre. Unhaut responsable de l'ONU tentera dimanche Ă  Moscou d'obtenir un «cessez-le-feu humanitaire» en Ukraine. De possibles exactions sur des civils ont Ă©tĂ© rapportĂ©es dans la rĂ©gion de Kiev Laure Calamy, Au moins j'aurais laissĂ© un beau cadavre CrĂ©dits photo le Pendant que je dĂ©laissais le blog, j'en ai profitĂ© pour vivre aller voir des amies, manger au restaurant, aller au cinĂ©ma, et ALLER AU THEATRE. Cela faisait plusieurs mois que je n'avais pas mis les pieds ni cotĂ© cour ni cĂŽtĂ© jardin. A vrai dire, la derniĂšre fois, mon dos avait mis 2 semaines Ă  s'en remettre. J'ai sautĂ© le pas et renouĂ© avec d'anciennes amours en jetant mon dĂ©volu sur Au moins j'aurais laissĂ© un beau cadavre de Vincent Macaigne, qui avait fait sensation au festival d'Avignon 2011. Au programme ce soir... Les critiques du journal local Ă©taient particuliĂšrement Ă©logieuses, les bribes d'infos trĂšs rapidement glĂąnĂ©es sur le net aussi aujourd'hui vous pouvez vous faire une idĂ©e du spectacle grĂące Ă  TĂ©lĂ©rama, Le Monde, France Inter En fait, j'aurais du me mĂ©fier. C'est suspect d'ĂȘtre ainsi adoubĂ© par diffĂ©rentes Ă©glises du microcosme cultureux parisien! Une piĂšce apprĂ©ciĂ©e par les critiques extrait du livret du spectacle Posons rapidement le dĂ©cor Macaigne est un acteur et jeune metteur en scĂšne qui a le vent en poupe et qui est aurĂ©olĂ© d'une aura de "petit gĂ©nie". Son crĂ©do, le théùtre Ă©pique. Pour faire vraiment trĂšs simple et schĂ©matique, le théùtre Ă©pique, c'est Brecht et Piscator. C'est un théùtre non pas du sentiment, mais de la raison, qui repose sur un phĂ©nomĂšne de "distanciation" qui permet au spectateur de prendre du recul par rapport Ă  ce qui se joue sur scĂšne. C'est un théùtre de la rupture au service d'une critique sociale et politique. Je vous vois venir d'ici..."boring, boring, boring"...Et bien, non, enfin pas pour les raisons que l'on croit. Macaigne revisite ici la tragĂ©die d'Hamlet Ă  sa sauce, en transposant dans une espĂšce de monde moderne et froid, Ă  grands coups de corps, de cris, de sexe, de miasmes. Un dĂ©cor industriel post ou prĂ©-apocalyptique avec un cimetiĂšre et un prĂ©fabriquĂ© suspendu dans les airs accompagnent le spectateur tout au long de cette loongue, trĂšs loooongue plongĂ©e dans la folie, et l'ignominie humaine. crĂ©dits photos La piĂšce dure 3h15 avec un entracte d'un quart d'heure Franchement pas le genre de chose Ă  me rebuter! Pour moi, c'est plutĂŽt des dĂ©fis scĂ©naristiques que je m'attends Ă  voir relever, et de belles prouesses de la part des comĂ©diens...Pour info, je me rappelle avoir vu en 2003 une piĂšce en allemand surtitrĂ© Der Meister und Margarita qui durait 4h mise en scĂšne de Franck Castorf qui dirigeait la VolksbĂŒhne! J'ai pris mon pied! De l'outrance des hurlements pendant la moitiĂ© voire les 3/4 de la piĂšce, un jeu sur l'illusion du rĂ©el assea fatiguant, deux scĂšnes de coĂŻt notamment une dans la boue, puis dans une mare de terre, des fluides qui giclent sur le public Ă  un rythme rĂ©gulier, une scĂšne de viol trĂšs longue, Ă©normĂ©ment de violence, des quintaux de glaire et des litres de faux sang, de la fumĂ©e qui envahit toute la salle, des confettis, des pĂ©tards, de l'argot, des "sales putes" et "grosse conne" Ă  tour de bras... Vous aimez les jeux du cirque? Vous en aurez pour votre argent! Pour moi, une piĂšce longue et inĂ©gale Quelques moments de fulgurance et de beautĂ© deux monologues audibles et plein de grĂące. Des dĂ©cors qui demeurent d'une grande beautĂ© et d'une belle puissance onirique mais justement, il y en a trop, tout le temps... On sent que Macaigne a travaillĂ© pour le cinĂ©ma. Il y a un parti pris au niveau de la plasticitĂ© de l'ensemble, vraiment pas mal du tout. Mais il y a trop de tout. J'ai fini par passer prĂšs de 20 min Ă  me questionner sur les jeux de lumiĂšre, plutĂŽt que sur le jeu des acteurs. La 2e partie m'a semblĂ© moins pire que la premiĂšre. Peut-ĂȘtre parce que je m'Ă©tais habituĂ©e au grand cirque sur le plateau, et que j'avais perdu tout espoir de voir quelque chose de vraiment intĂ©ressant. Bon, j'ai Ă©tĂ© bien perdue. Pour moi, le grand mĂ©rite de tout le schmilblik, c'est que ça m'a donnĂ© envie de relire Hamlet de Shakespear. Juste pour voir et lire entre les lignes ce que le metteur en scĂšne a trahi, et ce en quoi, il a Ă©tĂ© tout de mĂȘme fidĂšle....Je ne peux mĂȘme plus vous dire qui fait quoi...Il n'y avait pas d'intrigue. Les choses Ă©taient prĂ©sentĂ©es de façon a-chronologique! J'ai trouvĂ© l'ensemble d'une platitude sans fin. J'ai bien compris le parti pris de l'outrance, pour faire sortir le spectateur de son confort bourgeois. Mais, lĂ , c'Ă©tait l'overdose. Une heure en moins aurait peut-ĂȘtre Ă©tĂ© la bienvenue. Pour moi, rien de bien nouveau sous le soleil, sinon une bonne grosse caricature de ce que la mise en scĂšne actuelle peut faire de mieux, et surtout de pire. Un beau moment de théùtre contempoRIEN. Un bon gros foutage de gueule! Il y avait pas mal de scolaires dans la salle. J'ai trouvĂ© fĂącheux qu'on leur prĂ©sente ça ainsi, que leur Ă©ducation artistique soit Ă©maillĂ©e de"mise en scĂšne de l'extrĂȘme" qui n'ai absolument rien Ă  envier aux sĂ©ries, vidĂ©o youtube, jeux vidĂ©os auxquels ils sont trĂšs tĂŽt confrontĂ©s. Finalement entre leur "rĂ©el fantasmĂ©" et cette mise en scĂšne peu voire pas de frontiĂšres. Et c'estpourtant une aficionado de True Blood qui vous parle! Un bout de sein qui dĂ©passe, une pĂ©nĂ©tration suggĂ©rĂ©e et de l'autodĂ©rision ne me font pas peur! Mais quand c'est fait de façon intelligente, ça n'a pas le mĂȘme effet sur moi. Je me rapelle que pour moi, le théùtre, ado, Ă©tait une lucarne vers d'autres visions du monde, vers des idĂ©es, vers des questionnements. C'Ă©tait stimulant. Pour moi, point d'autre conclusion avec Macaigne que Consomme ta piĂšce de théùtre et CrĂšve! Ces partis pris du théùtre contemporain me fatiguent, et je pense rĂ©flĂ©chir Ă  deux fois avant de retourner dans un théùtre municipal, une scĂšne nationale ou une maison de la culture. Et vous, quels ont Ă©tĂ© vos expĂ©riences en matiĂšre de THEATRE? contemporain ou non? Est ce que ça vous botte?
Enutilisant l’ADN de la victime, dont le corps avait Ă©tĂ© exhumĂ© Ă  cette fin en 2015, les enquĂȘteurs ont enfin dĂ©couvert une correspondance Ă  la fin de l’annĂ©e derniĂšre sur un site de
n° 132 juin 2011 © CHRiStOPHE RAyNAuD DE LAgE/fEStiVAL D’AVigNON b Quels corps de mĂ©tier du théùtre les Ă©lĂšves ont-ils pu voir sur le plateau ? Toutes les personnes qui participent Ă  l’élaboration du spectacle sont mises en jeu, Ă  un moment ou Ă  un autre – les comĂ©diens, Ă©videmment ; – les techniciens, qui font les changements de dĂ©cor Ă  vue, revĂȘtus du mĂȘme costume de banane que celui de Claudius ; – le metteur en scĂšne, Vincent Macaigne, qui apparaĂźt au plateau Ă  l’entracte, pour le nettoyer et le dĂ©blayer ; – la rĂ©gie, qui, plusieurs fois, est prise Ă  partie par les comĂ©diens ; un technicien lumiĂšre intervient mĂȘme, lors de la piĂšce d’Hamlet, pour demander aux comĂ©diens de jouer ; – enfin, lors des reprĂ©sentations Ă  Avignon, le rĂ©gisseur lui-mĂȘme, qui monte sur le plateau pour demander aux spectateurs de regagner leur fauteuil. On rappellera aux Ă©lĂšves que le théùtre a toujours Ă©tĂ© pour Vincent Macaigne une aventure collective. b Faire rĂ©flĂ©chir les Ă©lĂšves Ă  leur rĂŽle en tant que spectateurs. Ont-ils Ă©tĂ© amenĂ©s Ă  faire des choses que le public de théùtre ne fait pas ordinairement ? Ont-ils eu le sentiment de participer Ă  la reprĂ©sentation, et Ă  quels moments ? Le théùtre de Vincent Macaigne amĂšne aussi le spectateur Ă  sortir de sa place et de son habituelle passivitĂ©. D’abord, parce qu’il est traitĂ© sans mĂ©nagement les premiers rangs se voient distribuer au dĂ©but du spectacle des protections auditives et une bĂąche plastique pour se protĂ©ger des Ă©claboussures de boue ou de peinture ; les femmes du public sont traitĂ©es de vieilles connes » et les quelques spectateurs qui pensent pouvoir filer discrĂštement avant la fin du spectacle sont en gĂ©nĂ©ral alpaguĂ©s par les comĂ©diens. Ensuite, parce que le public est aussi associĂ© au jeu – avant le spectacle, un chauffeur de salle l’encourage Ă  monter sur le plateau, puis Ă  danser et chanter avec lui ; 16 16n° 132 juin 2011 14. On peut voir la vidĂ©o ici xjvcpb_des-spectateurs-se-jettent-dans-lafosse-de-au-moins-j-aurais-laisse-un-beaucadavre_fun – pendant le spectacle, il est pris Ă  partie par les comĂ©diens qui lui demandent de jurer ou d’applaudir ; – des jeux avec des spectateurs sont mis en place le comĂ©dien Roger Roger offre un fruit et son numĂ©ro de portable Ă  une jolie femme dans le public ; Gertrude offre sa culotte Ă  l’issue de son strip-tease ; – des comĂ©diens s’assoient au milieu du public pendant la reprĂ©sentation de la piĂšce d’Hamlet, ou courent Ă  travers les rangĂ©es de spectateurs. Dans le spectacle, le public joue un rĂŽle Ă  part entiĂšre. Le fait de fouler le plateau est assez symbolique de la place qui lui est offerte. Certains spectateurs s’emparent de cet espace de libertĂ© qui leur est laissĂ©. On a ainsi vu, un soir, une jeune femme lancer Ă  son tour ses sandales sur le plateau lors du monologue de Claudius, et deux jeunes gens plonger dans la fosse de l’avant-scĂšne 14 ! Work in progress b Proposer aux Ă©lĂšves d’écouter la rencontre entre Vincent Macaigne et le public du Festival d’Avignon Que dit le metteur en scĂšne sur son rapport Ă  l’écriture ? Vincent Macaigne fait Ă©voluer soir aprĂšs soir la reprĂ©sentation. Lors de la confĂ©rence, il explique disposer de 7 ou 8 heures de matĂ©riau de spectacle, d’oĂč il a extrait 3h30. Le processus d’écriture du spectacle naĂźt du plateau et peut Ă©voluer en fonction des reprĂ©sentations. b Qu’est-ce que cela nous apprend du statut du texte dans un tel spectacle ? On est dans un processus d’écriture qui Ă©vacue la littĂ©raritĂ©. Le texte théùtral se construit au prĂ©sent du plateau, il n’est pas figĂ©, certaines phrases pouvant ĂȘtre modifiĂ©es par les comĂ©diens. On rappellera aux Ă©lĂšves que cela explique en grande partie pourquoi Vincent Macaigne refuse l’édition de ses textes. b Les Ă©lĂšves ont-ils observĂ© Vincent Macaigne en rĂ©gie ? Ont-ils l’habitude de voir un metteur en scĂšne agir ainsi ? Lors des reprĂ©sentations au Festival d’Avignon, Vincent Macaigne se tenait en rĂ©gie, Ă  vue, pendant tout le spectacle. Les spectateurs 17 17 b On pourra faire lire aux Ă©lĂšves la critique de Florence March qui regrette que la place rĂ©servĂ©e au public ne soit pas plus rĂ©elle et leur demander de rĂ©agir http// b De quelles autres pratiques culturelles, sociales ou mĂȘme sportives pourrait-on rapprocher le théùtre de Vincent Macaigne ? Au moins j’aurai laissĂ© un beau cadavre crĂ©e une convivialitĂ©, un partage que l’on trouve dans d’autres formes artistiques ou culturelles. Il emprunte certains codes Ă  d’autres formes plus populaires comme le concert, la tĂ©lĂ©vision ou mĂȘme le match. Cela confĂšre au spectacle un caractĂšre festif. C’est le cas par exemple de l’entracte, qui est accompagnĂ© d’une chanson de variĂ©tĂ© italienne, Sara Perche Ti Amo de Ricchi E Poveri. ont pu le voir donner des consignes de jeu aux comĂ©diens, rectifier des Ă©lĂ©ments en communiquant par de grands gestes survoltĂ©s, Ă  l’instar d’un chef d’orchestre. LĂ  encore, ce positionnement indique une volontĂ© de se confronter au prĂ©sent du plateau le jeu n’est pas fixĂ© une fois pour toutes, il rĂ©agit et Ă©volue en fonction de l’énergie de chaque soir. Le travail théùtral n’aboutit pas Ă  un produit fini qui serait le spectacle. Au contraire, le spectacle donne Ă  voir un processus de travail en direct. b Qu’est-ce que ce work in progress induit dans le jeu des comĂ©diens ? Les comĂ©diens auront certainement frappĂ© les Ă©lĂšves par leur Ă©nergie et l’intensitĂ© de leur jeu. Ils s’autorisent de larges parts d’improvisation, en rĂ©agissant aux dĂ©parts des spectateurs par exemple ou en dĂ©veloppant plus ou moins longuement certaines scĂšnes c’est le cas de la bagarre avant le dĂ©but de la piĂšce d’Hamlet, lorsque commence la seconde partie. Les comĂ©diens sont aussi associĂ©s Ă  l’écriture du spectacle. La scĂšne inaugurale du chauffeur de salle est nĂ©e d’un pari entre Vincent Macaigne et le comĂ©dien Sylvain Sounier. Celui-ci devait gagner 50 euros s’il rĂ©ussissait Ă  faire monter tout le public sur scĂšne !
PourĂȘtre informĂ© des prochaines dates pour "Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre" Inscrivez-vous Gratuitement Ă  l'Alerte Email. Salle oĂč cet Ă©vĂ©nement eut lieu : Chaillot - Théùtre National de la Danse / Salle Jean Vilar, 75016 Paris : Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre mis en scĂšne par Vincent Macaigne Théùtre National de Chaillot, Paris - Cet Ă©vĂ©nement n'est
Le théùtre tout le monde le connaĂźt, tout le monde en a lu, beaucoup en ont vu. Mais au théùtre, je ne sais pas si vous ĂȘtes dĂ©jĂ  montĂ© sur scĂšne avec le chauffeur de salle, si vous avez hurlĂ© avec lui sur la scĂšne, si les deux premiĂšres rangĂ©es de siĂšges Ă©taient couvertes avec des bĂąches et si vous avez dansĂ© sur SarĂ  PerchĂ© Ti Amo Ă  l’entracte. Si cela vous est dĂ©jĂ  arrivĂ©, j’imagine que vous avez assistĂ© Ă  Au moins j’aurai laissĂ© un beau cadavre de Vincent Macaigne. Le metteur en scĂšne de 32 ans a adaptĂ© Ă  sa maniĂšre un incontournable de Shakespeare Hamlet. Quand je vous parle de sa maniĂšre », c’est une maniĂšre dĂ©concertante, c’est du sang, c’est de la violence et pourtant c’est si poĂ©tique et artistique. Ce spectacle a dĂ©jĂ  fait couler beaucoup d’encre cet Ă©tĂ© au festival d’Avignon et jouĂ© Ă  Grenoble en novembre et Ă  OrlĂ©ans dĂ©s le 18 janvier prochain. Il aura laissĂ© les spectateurs Ă©tourdis et les critiques divisĂ©es. Peu importe si vous avez aimĂ© la piĂšce, car vous avez vĂ©cu une expĂ©rience théùtrale incroyable ! Commençons par le dĂ©cor tombes, croix, harmonium, aquarium, distributeurs de boissons, squelettes, bosquets fleuris, escalier en colimaçon montant Ă  une terrasse d’oĂč les personnages s’agitent parfois derriĂšre des vitres, sous le panneau en nĂ©on annonçant il n’y aura pas de miracle, ici » se juxtaposent sur la scĂšne crĂ©ant une ambiance dans cette piĂšce oĂč l’oncle d’Hamlet, Claudius, tient le rĂŽle le plus important et se dĂ©nude pour vous sans aucun complexe, sans aucune gĂȘne. Car oui, le théùtre de Macaigne c’est bien ça, on abolit les tabous, on met ses acteurs dans des situations embarrassantes, on hurle, on dĂ©verse des litres de sang et le public est Ă©gal aux acteurs, il est Ă  nu, transportĂ© dans ce monde. Et pour le transporter on utilise des fumĂ©es, on le fait rire, on offre un ananas et on joue la piĂšce dans les rangs. Comme ça, le public ne voit pas passer les 3 heures et demi, ovationne les acteurs, s’émoi devant la comĂ©dienne qui joue OphĂ©lie si jeune et qui se fait violer sur scĂšne. Mais le jeu d’OphĂ©lie n’est pas le seul Ă  ĂȘtre impressionnant, tous sont impressionnants en passant par la mĂšre d’Hamlet, Gertrude, si protectrice et irresponsable dont on retiendra cette rĂ©plique Qu’avons-nous fait de mal ? Nous avons juste Ă©tĂ© humain » et ce Hamlet si immature dont toutes les filles prĂ©sentes dans la salle le trouveront craquant. Oui, on peut aussi dire du théùtre de Macaigne qu’il est violent, parfois trop sanglant, trop bruyant, mais sa piĂšce est vivante, et on retrouve sĂ»rement tout ce que Shakespeare a laissĂ© comprendre sans le dire dans ces lignes. CrĂ©dits photo Christophe Raynaud de Lage
Dansune enquĂȘte publiĂ©e mardi soir sur son site Internet, L'Express rĂ©vĂšle que, jusqu'en 2018 au moins, le Centre du don des corps de l'universitĂ© Paris-Descartes a accueilli les milliers de dĂ©pouilles lĂ©guĂ©es Ă  la science dans des conditions indignes. Corps pourrissant faute de chambres froides climatisĂ©es, cadavres rongĂ©s par les souris et empilĂ©s les uns sur les autres
EtĂ© Le metteur en scĂšne adapte "Hamlet" dans l'hĂ©moglobine et la boue, au CloĂźtre des carmes. C'est le spectacle que l'on attendait au Festival d'Avignon celui qui vient tout casser, au risque d'excĂ©der une partie des spectateurs, et d'enthousiasmer les autres. Sous un titre formidable, Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre, il revisite Hamlet, de William Shakespeare, et se donne au CloĂźtre des carmes, oĂč le public des premiers rangs est protĂ©gĂ© par une bĂąche en plastique des jets d'hĂ©moglobine, de boue et de projectiles en tous genres qui ponctuent les quatre heures d'une reprĂ©sentation trash, foutraque et passionnante, signĂ©e Vincent Macaigne, un nouveau venu Ă  Avignon. A 32 ans, Vincent Macaigne est un des benjamins du Festival. A la ville, c'est un garçon calme, en apparence. Il a grandi Ă  Paris, entre un pĂšre français, commercial dans une entreprise, et une mĂšre iranienne, issue d'une famille trĂšs politisĂ©e. Depuis sa sortie du conservatoire, en 2002, il a signĂ© plusieurs spectacles, dont trois versions d'un Requiem de son cru, inspirĂ©, et une adaptation de L'Idiot, de DostoĂŻevski. Il a toujours Ă©crit, et fait du théùtre comme bon lui semble sans se soucier des autres ni chercher Ă  ĂȘtre en rĂ©action. Ce n'est pas un provocateur-nĂ© qui s'attaque Ă  Hamlet. Mais c'est un homme jeune en colĂšre, pour des raisons qu'il garde secrĂštes et d'autres qu'il exprime. Toutes traversent Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre, qui s'est construit comme les prĂ©cĂ©dents spectacles de Macaigne en travaillant sur le plateau avec sa bande d'acteurs amis. Ce travail ne s'arrĂȘte pas quand les reprĂ©sentations commencent. Chaque jour, le spectacle bouge. Chaque soir, Vincent Macaigne est au sommet des gradins, et il interpelle en direct ses acteurs, qui se ne gĂȘnent pas pour lui rĂ©pondre des choses comme "Tout le monde sait que c'est de la merde, ton texte Ă  la con." Le public ne s'en rend pas compte. Des phrases de ce genre se ramassent Ă  la pelle dans Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre, qui commence dans une ambiance assez survoltĂ©e, avec un appel au public Ă  venir sur le plateau, jonchĂ© de terre et de couronnes mortuaires qui entourent une tombe remplie d'eau. Comme dans le bon vieux théùtre d'intervention des annĂ©es 1960, le public entre dans le jeu, chante, danse et crie. Puis on lui dit de regagner les gradins. D'une certaine maniĂšre, c'est presque frustrant qu'est-ce que ça donnerait, Hamlet avec lui ? Ce que le public ne sait pas, c'est que ce dĂ©but est nĂ© d'un dĂ©fi. Le soir de la premiĂšre, samedi 9 juillet, Vincent Macaigne avait pariĂ© 50 euros avec un acteur qui lui avait dit "Je les ferai monter sur scĂšne. - Essaye, on verra bien !" On a vu. Et le public n'a pas mal pris du tout qu'on lui dise de regagner les gradins. Puis le spectacle a commencĂ© avec cette annonce "Vous allez voir l'histoire d'Hamlet, mon meilleur ami, mort il y a Ă  peine deux mois." Hamlet, chez Vincent Macaigne, c'est "un putain de dĂ©pressif", comme le lui dit Claudius, son oncle, qui vient d'Ă©pouser sa mĂšre, Gertrude. Il n'a de cesse de se jeter dans l'eau de la tombe de son pĂšre, dont le fantĂŽme revient sous la forme d'un furet empaillĂ©. "Faut pas que tu t'empĂȘches de vivre", le supplie OphĂ©lie. Tous les deux se revoient enfants. Des enfants qui s'aimaient dans un Danemark pourri, oĂč leur apprenait Ă  dĂ©verser la haine de soi contre l'autre, l'ennemi norvĂ©gien, qui "pique tout". Il y a des drapeaux français, danois et europĂ©en au fond du plateau, Ă  cĂŽtĂ© de distributeurs de boissons dont Claudius fait grand usage. Le personnage-clĂ© de ce Hamlet, c'est lui. Vincent Macaigne aime l'idĂ©e qu'il a peut-ĂȘtre eu de bonnes raisons de tuer son frĂšre, le pĂšre d'Hamlet. "Vous ne pouvez pas savoir ce que ça fait", dit Claudius, qui court comme un dĂ©ratĂ© Ă  la recherche de sa "coupable innocence". Tout est lĂ  Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre ne cesse de parcourir le champ d'une idĂ©e comment se tarit l'innocence, que ce soit celle de Claudius, d'Hamlet ou d'OphĂ©lie. Eh bien, elle se tarit dans le sang et les larmes, qui prennent dans le spectacle la forme exacerbĂ©e de la provocation. Au fond, Vincent Macaigne ne réécrit pas Hamlet. Il dialogue avec la piĂšce, lui fait sortir ce qu'elle a dans les tripes, de son point de vue, aujourd'hui. C'est souvent trĂšs drĂŽle, surtout dans la premiĂšre partie, qui fait Ă©clater de rire le public. Dans la seconde, une mĂ©lancolie profonde prend le dessus, sur le mode "Il ne faut pas en vouloir Ă  quelqu'un qui est nĂ©, et qui a ratĂ©." Ecrite en nĂ©ons placĂ©s tout au sommet du dĂ©cor, une phrase le dit autrement "Il n'y aura pas de miracles, ici", en pointant une flĂšche sur le plateau. Mais de la vie, oui, il y en a. Et beaucoup mĂȘme, jusqu'Ă  l'outrance. Ça castagne dans tous les sens, Ă  grands jets de fumigĂšnes, d'insultes, de gags Ă  la noix de coco. Bref, c'est un "grand bordel", pas toujours maĂźtrisĂ©, parfois longuet, et trouĂ© de moments incandescents, comme la scĂšne oĂč des comĂ©diens jouent devant la cour une comĂ©die racontant l'histoire du meurtre du pĂšre d'Hamlet. Mais Ă  la fin, un grand silence se fait le public, sonnĂ©, part dans la nuit d'Avignon, en se disant qu'au moins, lĂ , il a vĂ©cu quelque chose. Au moins j'aurai laissĂ© un beau cadavre, d'aprĂšs Hamlet, de Shakespeare. Ecrit et mis en scĂšne par Vincent Macaigne. Avec Samuel Achache, Laure Calamy, Jean-Charles Clichet, Julie Lesgages, Emmanuel Matte, Rodolphe Poulain, Pascal RĂ©nĂ©ric, Sylvain Sounier. CloĂźtre des carmes, jusqu'au 19 juillet, Ă  21 h 30. DurĂ©e 3 h 45. TĂ©l. 04-90-14-14- 14. De 13 € Ă  27 €. Brigitte Salino Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil Ă  la fois Ce message s’affichera sur l’autre appareil. DĂ©couvrir les offres multicomptes Parce qu’une autre personne ou vous est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil. Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil Ă  la fois ordinateur, tĂ©lĂ©phone ou tablette. Comment ne plus voir ce message ? En cliquant sur » et en vous assurant que vous ĂȘtes la seule personne Ă  consulter Le Monde avec ce compte. Que se passera-t-il si vous continuez Ă  lire ici ? Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connectĂ© avec ce compte. Y a-t-il d’autres limites ? Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant Ă  des moments diffĂ©rents. Vous ignorez qui est l’autre personne ? Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe. DansAu moins j’aurai laissĂ© un beau cadavre, d’aprĂšs Hamlet de Shakespeare, le jeune metteur en scĂšne va jusqu’au bout dans l’excĂšs et dans l’épuisement des Ă©nergies.
S’il y a un reproche que l’on ne peut pas adresser Ă  Vincent Macaigne, c’est de faire les choses Ă  moitiĂ©. Dans Au moins j’aurai laissĂ© un beau cadavre, d’aprĂšs Hamlet de Shakespeare, le jeune metteur en scĂšne va jusqu’au bout dans l’excĂšs et dans l’épuisement des Ă©nergies. On ressort de lĂ  en en ayant pris plein la face et avec le dĂ©sir de hurler Ă  notre tour. Quelques indices nous mettent sur la voie de ce qui nous attend, dĂšs le hall du Palais Chaillot. A la recherche de notre porte pour entrer dans la salle Jean Vilar, on se voit distribuer des obturateurs, comme aux concerts de hard-rock. En descendant les marches, on entend un bruit sourd. On se prĂ©cipite pour voir ce qu’il se passe, ce que l’on rate, et on dĂ©couvre qu’un comĂ©dien a fait descendre une centaine de jeunes sur le plateau, qui applaudissent et chantent avec lui, dĂ©chaĂźnĂ©s. Le message est assez clair ce que l’on va voir est du théùtre libĂ©rĂ© des conventions, dans lequel les comĂ©diens s’adressent Ă  nous, constamment conscients de notre prĂ©sence, et dans lequel les rires et les cris des interprĂštes et du public sont dĂ©bridĂ©s. Le dĂ©cor composite, qui fait se cĂŽtoyer des stĂšles funĂšbres ornĂ©es de fleurs et des distributeurs de boisson, un mobil home et une tombe ouverte remplie d’un liquide non identifiĂ© sur le devant de la scĂšne – qui oblige les premiers rangs Ă  se protĂ©ger derriĂšre des bĂąches en plastique – finit de sĂ©duire notre tolĂ©rance et de nous prĂ©parer pour le meilleur et pour le pire. DĂšs qu’il est question de réécriture, l’équation se formule en termes de fidĂ©litĂ© et de libertĂ©. Avec Macaigne, il est difficile – voire inutile – de trancher. Les personnages et les principaux Ă©pisodes sont ceux de Shakespeare le pĂšre d’Hamlet est mort, et le mariage de sa mĂšre et de son oncle fait suite au deuil un peu trop rapidement aux yeux du fils. Le fantĂŽme du roi dĂ©cĂ©dĂ©, la mise en abyme du théùtre et l’amour d’OphĂ©lie rĂ©pondent eux aussi prĂ©sents Ă  l’appel. La langue en revanche, Ă  part l’incontournable ĂȘtre ou ne pas ĂȘtre », est remodelĂ©e de fond en comble. Claudius appelle Hamlet enfant pourri gĂątĂ© » qui plombe la joie de la noce, alors que lui est accoutrĂ© d’un costume de banane le jour de son mariage, et qu’il est le seul Ă  s’ĂȘtre dĂ©guisĂ© malgrĂ© son message Facebook aux invitĂ©s. Le ton est donnĂ© et il n’est pas lieu de s’offusquer. La violence de la piĂšce d’origine est mise en acte et les comĂ©diens n’hĂ©sitent pas une seconde Ă  se jeter dans la tombe pleine d’eau du roi, Ă  se rouler dans la boue et Ă  s’asperger de faux sang. Leurs cordes vocales s’usent Ă  force de crier et ils courent partout sur le plateau et parmi le public, qui n’hĂ©site pas Ă  se lever pour livrer passage. Mais les encouragements tout aussi Ă©nergiques de Macaigne, du haut de la rĂ©gie, n’autorisent aucun rĂ©pit. A l’entracte, alors que la chanson Sara perche ti amo » est diffusĂ©e dans tout le théùtre, des traces de boue et d’eau dans les marches chatouillent notre curiositĂ© et nous encouragent Ă  rester, Ă  ne pas rejoindre encore notre confort douillet. Un plateau plus ou moins nettoyĂ© nous attend pour cette seconde partie, plus sombre encore et plus Ă©prouvante. Les rares moments de beautĂ© sont Ă©phĂ©mĂšres, Ă©chouant Ă  trouver leur place dans cet univers. Les salves de serpentins et le nuage de paillettes dorĂ©es retombent au sol et se mĂ©langent Ă  la boue et au sang. Le chĂąteau gonflable qui s’élĂšve et envahit la scĂšne retombe sur lui-mĂȘme, malgrĂ© les efforts dĂ©sespĂ©rĂ©s de Claudius pour le redresser. Heureusement, les Ă©motions provoquĂ©es, du rire Ă  l’indignation, et la sollicitation des comĂ©diens Ă  se lever et applaudir chaque communication du roi, permettent de se reprendre, de reprendre conscience de soi-mĂȘme. C’est indispensable vue la puissance des gestes et des paroles qui nous frappent. Macaigne et sa troupe sont bien conscients de tous les effets qu’ils produisent et en jouent. Le faux sang est bien du faux sang, il ne sert Ă  rien de hurler et de pleurer ; les paillettes qui s’envolent au-dessus de la scĂšne s’envolent grĂące Ă  Lucie, la rĂ©gisseuse, il ne faut pas se laisser tromper ; et si le geste prend le dessus sur la parole, au point qu’on ne comprend parfois plus rien, c’est parce que ce ne sont pas les mots qui comptent, mais l’acte de crier dans le micro lui-mĂȘme. La scĂšne et les comĂ©diens sont mis dans tous leurs Ă©tats pour mener le drame Ă  son terme le bain de sang final survient enfin, littĂ©ralement reprĂ©sentĂ© sur scĂšne dans le bocal qui contient quatre ou cinq corps peinturlurĂ©s de rouge. Les moutons amenĂ©s sur scĂšne pour la fin s’effraient un peu de ce carnage, et l’enseigne lumineuse qui domine la scĂšne depuis le dĂ©but clignote Il n’y aura pas de miracles ici ». TrempĂ©s de la tĂȘte aux pieds, les comĂ©diens revĂȘtent un peignoir vite tĂąchĂ© et viennent saluer, en compagnie des rĂ©gisseurs, pour qui le spectateur Ă©prouve une certaine compassion. En remontant les marches, certains crient au massacre de Shakespeare et d’autre se rĂ©jouissent de n’avoir pas passĂ© une soirĂ©e mortelle Ă  regarder un Hamlet trop classique et trop rangĂ© il faut choisir son camp et s’y tenir. F. pour Inferno Pour en savoir plus sur le spectacle, cliquez ici.
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au moins j aurai laissé un beau cadavre